jeudi 25 août 2016

Lactalis contre les producteurs de lait : symbole d’une époque

Lactalis contre les producteurs de lait : symbole d'une époque

Aujourd'hui, les éleveurs rencontrent les dirigeants de Lactallis, devenu leur bête noire pour payer le litre de lait 25,7 centimes, 1 à 3 de moins que les autres grands acteurs de la filière. Une dérive effarante qui n'est malheureusement qu'une illustration extrêmement symptomatique de notre époque.



Tout marché et rapports de force

En 2001, le litre de lait valait 31 centimes. En 2014, il avait dépassé 37 centimes. Mais il est tombé sous les 30 centimes aujourd'hui, autour de 27,5 centimes. Lactalis semble accorder encore moins aux producteurs de lait, seulement 25,7 centimes, ce qui a délenché la colère des éleveurs, qui subissent des prix largement inférieurs à leur prix de revient, que le président des Jeunes agriculteurs de la Mayenne estime autour de 38,6 centimes, en incluant une rémunération limitée à un SMIC et demi, ce qui n'est pas cher payé pour la quantité et la difficulté du travail. Un papier détaillé et passionnant de la Tribunel'estime plutôt autour de 35 centimes le litre. Une autre analyse du Monde indique en outre que ce sont les producteurs qui ont profité de la situation, quand les producteurs de lait ont perdu.

La situation des agriculteurs s'est dégradée avec le démantèlement progressif de la PAC, chose que tous les pays asiatiques ne se risqueraient pas à faire, eux qui continuent de protéger leurs producteurs de riz. Les prix planchers ont été retirés et les quotas progressivement supprimés, en avril 2015. La baisse des importations Chinoises et l'embargo russe ont achevé de dégrader la situation en réduisant la demande, poussant les prix à la baisse. Abandonnés aux fluctuations exubérantes du marché, les producteurs de lait sont désormais la variable d'ajustement d'un système, où, à leur contraire, les grands industriels n'ont pas de gros problèmes à défendre la rentabilité de leurs opérations. C'est ce qui explique les manifestations autour du siège de Lactalis et les discussions prévues.

Tout ceci montre une nouvelle fois que dans ce monde dérégulé économiquement, c'est seulement la loi du plus fort qui s'impose. Et ici, les grands industriels, Lactalis au premier rang, ont une position de force bien plus solide que les milliers d'éleveurs, ravalés au rang de variables d'ajustement. Si le monde manque de lait, alors, ils pourront vivre de leur travail car les cours pourront couvrir leurs coûts de production. Si des éléments perturbent le marché, ils peuvent alors se retrouver à vendre le fruit de leur travail à perte… Ceci montre la brutalité intrinsèque de ces marchés dérégulés. Il est effarant que nous fassions subir cela à ceux qui nous nourrissent, qui mériteraient un peu plus de considération, et surtout, de protection de notre part, comme les pays asiatiques, eux, continuent à le faire.


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